Locomotive à vapeur 18 201

C'est vraiment une histoire presque incroyable qui conduisit à la construction de l'une des locomotives à vapeur allemandes les plus élégantes et les plus performantes: 18 201, c'est le nom de ce bolide capable d'atteindre une vitesse de 180 km/h qui sortit pour la première fois des hangars historiques de l'atelier de réparation de Meiningen le 31 mai 1961. Cette locomotive, c'était le bébé de Max Baumberg, génial ingénieur en locomotives à vapeur, qui, après la guerre, fut directeur du "Fahrzeug- und Versuchs-Anstalt Halle" (FVA). Baumberg avait un faible pour les grosses et puissantes locomotives pour trains rapides. Dès 1948, il avait fait l'acquisition à l'Ouest de la IVh 18 314 badoise, connue plus tard sous le nom de "Jorsch". Après 1952, Baumberg reprit les locomotives à quatre cylindres 07 1001, 08 1001 et 79 001, construites en France. C'est à cette époque que les expressions "zoo de Baumberg" ou "cirque de Baumberg" se sont établies parmi les cheminots. A la fin des années 1950, les Françaises avaient depuis longtemps quitté le manège de Baumberg, qui se mit donc à la recherche d'une nouvelle star pour son cirque; une star capable de remorquer de nouvelles voitures voyageurs destinées à l'exportation lors de trajets d'essai à des vitesses pouvant atteindre 160 km/h. La seule locomotive de la Reichsbahn capable d'atteindre cette vitesse était la 61 002 de l'ancien train Henschel-Wegmann. A partir de son train moteur et de son train de roulement, d'une partie de son châssis et des composants de la locomotive à haute pression H 45 024 "ratée", Baumberg construisit une locomotive Pacifique ultramoderne à tender séparé (disposition d essieux 2'C1'). Le générateur de vapeur utilisé était la chaudière unifiée reconstruite 39E. La nouvelle 18 201 était exceptionnelle à tous points de vue : elle possédait de gigantesques roues motrices - 2,30 mètres de hauteur -, trois cylindres et développait sur les rails une impressionnante puissance de 2150 CV. La porte pointue de la boîte à fumée rappelait la S 3/6 bavaroise, les écrans pare-fumée et les zones carénées ressemblaient à la super locomotive à vapeur française 232-U-1. La nouvelle 18 201 fut rattachée au dépôt de Halle P, auquel la "Jorsch" était également affectée. Très vite, la 18 201 s'avéra vraiment être une grande réussite. Baumberg pouvait être fier de son bolide qui, le 12 octobre 1972, atteignit une vitesse de 182,4 km/h. La belle machine verte devint ainsi la locomotive à vapeur opérationnelle la plus rapide du monde. À partir de 1980, "Jimmo", nouveau nom de la 18 201, n'était presque plus utilisée que pour des voyages spéciaux. Afin de pouvoir effectuer de plus longs trajets sans devoir s'arrêter pour faire le plein d'eau et de fuel, on prépara au milieu des années 1980 un tender supplémentaire adapté, dont l'aspect fut adapté à celui de la locomotive. En 1985, les "Jimmo" purent pour la première fois partir à l'Ouest, à l'occasion du grand anniversaire des chemins de fer à Nuremberg. Deux ans plus tard, le bolide fut l'invité vedette du grand anniversaire du chemin de fer en Autriche. Après la chute du mur, "Jimmo" circula encore lors de nombreux voyages spéciaux jusqu'en 1997, date à laquelle la DB décida de la garer froide. Le célèbre musicien Axel Zwingenberger et l'entrepreneur Andreas Goldschagg parvinrent finalement à convaincre le DBMuseum de recueillir "Jimmo". Ils firent remettre en état la super-locomotive de Baumberg, fondèrent la firme "DampfPlus" et utilisèrent la 18 201 à partir de 2002 pour remorquer des trains spéciaux dans toute la République fédérale ainsi que dans les pays voisins. Cette deuxième carrière très réussie se termina finalement le 1er septembre 2018, lorsque la locomotive partit pour un voyage d'adieu spécial très remarqué, peu avant l'expiration du délai. Depuis 2019, "Jimmo" appartient à l'entreprise ferroviaire privée Wedler Franz Logistik, qui souhaite remettre la machine en service à moyen terme. Actuellement, la star de Max Baumberg est bien à l'abri, dans le dépôt de Nossen. A propos de Max Baumberg : il put assister au succès de sa 18 201 pendant encore 17 ans, avant de prendre une retraite bien méritée. Il n'avait probablement qu'un rêve: que sa locomotive fasse un jour carrière à l'Ouest.